15.07.80
Rêvé que Jacques donnait des conférences sur des poètes américains dits « ensemblistes », où il montrait la fidélité à la nature de leurs observations sur les animaux et que tout était déterminé par « l’ensemble » (?). À la fin de la conférence je décide de poser une question en public mais intimidée attends que nous soyons en privé ;le supplie de me laisser parler ;lui dis que la table de vérité des propositions poétiques ne se pouvait dresser ;il m’interrompt avec véhémence ;je fonds en larmes et ne peux continuer.
Alix Cléo Roubaud, Journal (1979-1983), Fiction & Cie, Seuil, 1984, 2009.
15.VII.80
Rêvé que Jacques donnait des conférences sur des poètes américains dits « ensemblistes », où il montrait la fidélité à la nature de leurs observations sur les animaux et que tout était déterminé par « l’ensemble » (?). À la fin de la conférence je décide de poser une question en public mais intimidée attends que nous soyons en privé ;le supplie de me laisser parler ;lui dis que la table de vérité des propositions poétiques ne se pouvait dresser ;il m’interrompt avec véhémence ;je fonds en larmes et ne peux continuer.
Alix Cléo Roubaud, Journal (1979-1983), Fiction & Cie, Seuil, 1984, 2009.
25.11.81
Après la mort de Jean Eustache, le 5.XI
Réveillée heureuse.
Je raconte à P. ce rêve:avertie d’une projection d’Une sale histoire, je me dirige vers le forum des Halles ;m’y perds ;me retrouve dans une chambre d’hôpital où Jean,rasé et les cheveux coupés,peu à peu bouge et parle.Je touche sa poitrine ;elle est chaude,et enfin je me dis:mais tout a été faux,il n’est pas mort du tout,et je pense à son projet ironique de « disparaître » du monde du cinéma pour réapparaître sous un pseudonyme.Heureuse quoiqu’un peu irritée de cette sale plaisanterie,je pars le dire à Jacques et lui précise que la survie de Jean est confidentielle.
-oui,oui.
-comment ça ? C’est bien un rêve banal,négation de la mort
-il s’agit bien de survie,d’immortalité(thème auquel P. semble tenir).
Parle de chaînes de suicides,Catherine n’ayant pas sauvé Jean,et de la famille de Jacques :»c’est ainsi dans les tragédies grecques.un mort pour un vivant ». Je sors avec l’impression d’avoir compris quelque chose,mais cette impression est de courte durée ;je regarde les vitrines,mange un Big Mac,attends trois heures avant d’aller chez le notaire. C’est vrai,P. parle Beaucoup plus qu’il y a deux ans.A-t-il peur que je parte pour qu’il cherche à me rattraper.
L’asthme comme suicide ?
Se survivre à soi-même
Alix Cléo Roubaud, Journal (1979-1983), Fiction & Cie, Seuil, 1984, 2009.
Intimité plus grande avec les astres
Et dans la nuit sondée plus profond
Dans la nuit rapprochée la terre
Débouche sur le soleil cette étoile agrandie
Au coeur de la nuit le jour
Nuit de la nuit connait
Une étoile plus brillante
Michel Deguy, Ouï dire, éditions de La différence,
Collection Orphée, 1992, p.51.
« Si, recherchant l'origine des éléments du rêve, j'examine ce que me fournit ma propre existence, j'affirmerai d'abord que tout rêve est lié aux événements du jour qui vient de s'écouler. »
Sigmund Freud, L'interprétation des rêves, Presses Universitaires de France, 1967.
« Le monde des rêves permet de poser un nouveau regard sur le monde et donne plus de possibilités de créer des choses folles, des situations hors-normes. Il nous rend libres de prendre plus de risques, permet de créer de nouvelles images, de nouvelles structures… »
Fabienne Cabado, Sephan Thoss / Rêve : puzzle surréaliste, 9 mai 2013, voir.ca.com.
25.11.81
Après la mort de Jean Eustache, le 5.XI
Réveillée heureuse.
Je raconte à P. ce rêve:avertie d’une projection d’Une sale histoire, je me dirige vers le forum des Halles ;m’y perds ;me retrouve dans une chambre d’hôpital où Jean,rasé et les cheveux coupés,peu à peu bouge et parle.Je touche sa poitrine ;elle est chaude,et enfin je me dis:mais tout a été faux,il n’est pas mort du tout,et je pense à son projet ironique de « disparaître » du monde du cinéma pour réapparaître sous un pseudonyme.Heureuse quoiqu’un peu irritée de cette sale plaisanterie,je pars le dire à Jacques et lui précise que la survie de Jean est confidentielle.
-oui,oui.
-comment ça ? C’est bien un rêve banal,négation de la mort
-il s’agit bien de survie,d’immortalité(thème auquel P. semble tenir).
Parle de chaînes de suicides,Catherine n’ayant pas sauvé Jean,et de la famille de Jacques :»c’est ainsi dans les tragédies grecques.un mort pour un vivant ». Je sors avec l’impression d’avoir compris quelque chose,mais cette impression est de courte durée ;je regarde les vitrines,mange un Big Mac,attends trois heures avant d’aller chez le notaire. C’est vrai,P. parle Beaucoup plus qu’il y a deux ans.A-t-il peur que je parte pour qu’il cherche à me rattraper.
L’asthme comme suicide ?
Se survivre à soi-même
Alix Cléo Roubaud, Journal (1979-1983), Fiction & Cie, Seuil, 1984, 2009.